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Rupture conventionnelle : nécessité de prouver la remise d’un exemplaire au salarié sous peine de nullité

“Il appartient à celui qui invoque la remise d’un exemplaire de la convention de rupture à l’autre partie d’en rapporter la preuve.”

L’employeur peut payer chèrement l’absence de preuve de la remise du formulaire Cerfa au salarié.

En l’espèce, un salarié avait signé, en octobre 2013, une rupture conventionnelle avec son employeur dans un contexte conflictuel.

Plusieurs mois après son homologation, il en soulève la nullité devant le Conseil de prud’hommes en raison de prétendues pressions subies  et de son absence de maîtrise du français et formule à ce titre des demandes indemnitaires.

Au soutien de sa demande de nullité, le salarié faisait notamment valoir qu’aucun exemplaire de la convention de rupture (formulaire Cerfa) ne lui avait été remis par l’employeur à l’issue de la réunion de signature.

Le salarié soutenait que la remise d’un tel exemplaire était nécessaire pour lui permettre de prendre la mesure de ses engagements et se rétracter éventuellement pendant la période de réflexion. Pour démontrer l’absence de remise, il faisait notamment valoir que l’employeur avait conservé tous les exemplaires signés afin d’y rajouter la mention « lu et approuvé ».

L’employeur soutenait pour sa part que le salarié ne démontrait aucun vice du consentement permettant de remettre en cause le caractère libre et éclairé de sa décision lors de la signature de la convention.

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel rendu en faveur de l’employeur en retenant que la charge de la preuve de l’absence de remise de la convention ne peut reposer sur le seul salarié. Ce dernier peut donc valablement solliciter la nullité de la rupture conventionnelle homologuée si l’employeur ne peut démontrer lui avoir remis un exemplaire du formulaire Cerfa lui revenant à l’issue de la réunion de signature.

La décision repose sur les fondements suivants :

(i) d’une part la remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié [était] nécessaire à la fois pour que chacune des parties puisse demander l’homologation de la convention, dans les conditions prévues par l’article L. 1237-14 du code du travail, et pour garantir le libre consentement du salarié, en lui permettant d’exercer ensuite son droit de rétractation en connaissance de cause, à défaut d’une telle remise, la convention de rupture est nulle,

(ii) d’autre part qu’ en cas de contestation, il appartient à celui qui invoque cette remise d’en rapporter la preuve.”

Alors que le nombre de rupture conventionnelles ne cesse d’augmenter depuis 2008, il est donc désormais indispensable pour les employeurs de se ménager systématiquement la preuve de la remise d’un exemplaire original au salarié à l’issue des négociations.

Cette preuve peut être formalisée au travers : 

(i) de la signature par le salarié d’un récépissé attestant de la remise de l’exemplaire Cerfa lui revenant ; ou 

(ii) d’une mention expresse et manuscrite du salarié en ce sens sur le formulaire Cerfa lors de la réunion de signature.

Les conséquences de la nullité de la rupture conventionnelle peuvent être particulièrement lourdes pour l’employeur qui risque une condamnation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappel de préavis et d’indemnité de licenciement etc. faute de disposer d’éléments de preuve suffisant.

Le salarié devra néanmoins restituer les sommes versées au titre de la rupture conventionnelle ainsi annulée.

Notez toutefois qu’il s’agit d’une confirmation de jurisprudence, la cour de cassation s’étant déjà prononcée en sens récemment. (Cass.soc., 3 juill. 2019, n°18-14.414, Cass. soc., 23 sept. 2020, pourvoi n°18-25.770)

Source : Cass. soc. 10 mars 2021 n° 20-12.801


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