Flash Actualités

Protection des lanceurs d’alerte : quelles sont les améliorations apportées par la loi ?

La loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte a été promulguée le 21 mars 2022 à la suite de la validation de l’essentiel de ses mesures par le Conseil constitutionnel. Elle entrera en vigueur à compter du 1er septembre 2022.

Portée par Sylvain Waserman, son objectif est de corriger les insuffisances de la loi Sapin 2 du 9 décembre 2016 et transposer la directive européenne du 23 octobre 2019.

En pratique quelles sont les améliorations prévues par la loi ? Et quel impact pour les employeurs et les salariés ?

  • Une définition plus large du lanceur d’alerte

Il s’agit d’une personne physique qui lance une alerte de bonne foi, non plus de « de manière désintéressée », mais uniquement « sans contrepartie financière directe ».

L’objectif de cette précision est de ne pas exclure du bénéfice de la protection un salarié entrant en conflit avec son employeur (Rapport AN, n° 4663 et 4664).

  • Elargissement du champ des alertes 

La  tentative de dissimulation d’une violation est ajoutée à la liste des faits susceptibles d’être dénoncés à savoir crime, délit, menace ou un préjudice pour l’intérêt général, violation d’un engagement international. Quant à la violation d’un engagement international de l’entreprise, elle n’a plus a être «grave et manifeste ».

Par ailleurs, la loi supprime la condition de la connaissance personnelle de l’information signalée obtenue dans le contexte professionnel. Ainsi, le lanceur d’alerte peut dorénavant signaler des faits qui lui ont été rapportés, par un autre salarié par exemple, mais dont la véracité ne lui semblerait pas devoir être remise en cause. En revanche, le lanceur d’alerte doit toujours avoir eu personnellement connaissance des faits lorsque les informations n’ont pas été obtenues dans le cadre de ses activités professionnelles.

Le droit d’alerte en cas de risque grave pour la santé publique ou l’environnement dont dispose tout salarié ou tout élu au CSE rentre désormais dans le cadre du dispositif d’alerte.

  • Simplification des canaux de signalement 

La nouvelle loi met fin à la hiérarchie entre les canaux de signalement instaurée par la loi Sapin 2.

Auparavant, sauf en cas de danger grave et imminent ou de risque de dommages irréversibles, le lanceur d’alerte devait respecter la procédure suivante :

  1. signalement interne auprès de sa hiérarchie ou toute personne désigné par l’employeur en suivant la procédure de recueil des alertes éventuellement en place dans l’entreprise ;
  2. à défaut de réaction de l’entreprise dans un délai raisonnable, signalement externe auprès de la justice, l’administration ou l’ordre professionnel ;
  3. en dernier lieu, si l’organisme saisi n’avait pas réagi dans un délai de trois mois, possible divulgation publique auprès des médias par exemple.

    Désormais, le lanceur d’alerte a le choix entre le signalement interne et le signalement externe à l’autorité compétente, au Défenseur des droits, à la justice ou à un organe européen. Il n’est plus tenu de passer au préalable par un signalement interne.

    La divulgation publique reste possible dans certaines situations précisées par la loi (absence de traitement d’un signalement externe à l’expiration d’un certain délai, danger grave et imminent etc.).
  • Amélioration des dispositifs de recueil des alertes 

Si la loi impose toujours aux entreprises d’au moins 50 salariés de mettre place une procédure de recueil des alertes, elle indique qu’il devra également s’agir d’une procédure de traitement des données.

En outre, l’employeur devra consulter le CSE avant de mettre en place cette procédure de recueil des alertes.

  • Interdiction des discriminations et des mesures de représailles et protection de l’entourage

Le candidat à l’embauche ou le salarié qui lance une alerte est actuellement protégé contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, de formation, de qualification, de classification, de promotion, de mutation ou de renouvellement de contrat.

La loi élargit le champ des discriminations interdites, en ajoutant celles en matière d’horaires de travail et d’évaluation de la performance.

Elle modifie également le code pénal et le code du travail pour ajouter à la liste des critères discriminatoires prohibés le fait d’être un lanceur d’alerte.

En outre, la loi crée une liste de représailles interdites applicable à tout lanceur d’alerte, quel que soit son statut (salarié, travailleurs indépendants, collaborateurs extérieurs, etc.) et interdit les menaces ou tentatives de recourir à ces représailles (ex. : mesures disciplinaires, coercition, intimidation atteinte à la réputation de la personne sur les réseaux sociaux, mise sur liste noire, annulation d’une licence ou d’un permis).

Cette protection bénéficie également aux témoins de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime en ayant eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions ainsi que les victimes ou témoins de harcèlement moral ou sexuel.

  • Irresponsabilité du lanceur d’alerte

Sur le plan civil, la loi institue un principe d’irresponsabilité du lanceur d’alerte, inexistant jusqu’alors, pour les dommages causés dès lors qu’il avait des motifs raisonnables de croire que l’alerte était nécessaire à la sauvegarde des intérêts en cause.

Sur le plan pénal, le lanceur d’alerte demeure irresponsable lorsqu’il porte atteinte à un secret protégé par la loi, dès lors que cette divulgation est nécessaire et proportionnée à la sauvegarde des intérêts en cause. Idem lorsqu’il soustrait, détourne ou recèle les documents ou tout autre support contenant les informations dont il a eu connaissance de manière licite

  • Autres mesures

Afin d’améliorer l’information des salariés, la loi exige que le règlement intérieur rappelle l’existence du dispositif de protection des lanceurs d’alerte.

Par ailleurs,  le conseil des prud’hommes pourra désormais, à l’occasion de tout litige et en complément de toute autre sanction, obliger l’employeur à abonder le compte personnel de formation du salarié ayant lancé l’alerte jusqu’à 8 000 €.

Certaines de ces mesures seront prochainement précisées par décret.

Source : Loi n°2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte

Auteur
Date
Catégorie